La mobilisation contre l’amendement  1457 du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique visant à reconnaitre un droit de pré-occupation ou droit d’antériorité aux activités culturelles et touristiques n’a pas fait le poids face à l’intense activité de lobbying des porteurs du projet, surtout face à l’influence de leurs discrets soutiens politiques, bien supérieure à celle de Madame Annaïg Le Meur ou de Monsieur Le Gendre.

Un type d’activités a néanmoins été supprimé du texte adopté – celui des activités sportives – ce qui prouve qu’il était encore possible d’intervenir au niveau de la commission paritaire mixte (CPM). Et prouve que les promoteurs du projet, Culture Bar-Bars en tête, ont dû recevoir de solides assurances de réussite de leur entreprise puisqu’ils ont visiblement rédigé leur communiqué de presse avant même que siège la CMP. En effet, tous se félicitent de l’extension du principe d’antériorité à trois types d’activités alors que finalement seuls deux ont été retenus.

S’agissant d’une procédure d’urgence, le délai de saisine a priori du Conseil constitutionnel était très court, aucune des conditions nécessaires n’a pu être réunies et la loi a été promulguée le 27 décembre, avec pour conséquence l’extinction des voies de recours sur l’ensemble du projet.

Reste maintenant une toujours possible saisine a posteriori, à l’occasion d’une action judiciaire*, à supposer qu’une victime ait le courage et les moyens financiers de se lancer dans une procédure encore plus longue et plus coûteuse qu’aujourd’hui, ce qui n’est pas peu dire.

Rappelons que les « activités culturelles » dont il est ici question, sont en réalité, dans l’idée des promoteurs de l’amendement, les activités de débits de boisson (bar, cafés, discothèques…) ainsi que l’atteste le dernier paragraphe de l’argumentaire**. Il faudra donc que les exploitants de ces établissements réussissent à convaincre qu’ils dirigent des lieux culturels. Des lieux de rencontre et de convivialité, oui, parfois, mais des lieux culturels ? Les cafés-concerts sont certes considérés comme des « lieux culturels », mais tous les bars de nuit et cafés n’ont pas la qualification de cafés-concerts, loin s’en faut. De même, considérer que vendre de l’alcool est une activité « touristique » ne va pas non plus aller de soi.

Reste la restriction rappelant que ces activités doivent être en règle avec la réglementation. Mais quand un bar de nuit (pour prendre un exemple) respecte la réglementation, il ne crée pas de nuisances et personne ne se plaint. Alors à quoi bon avoir voulu modifier la loi ? Pour se donner de l’importance ? marquer un territoire ? affirmer son pouvoir ?

Sans revenir sur l’argumentaire développé dans nos articles précédents, le vote de cet amendement appelle néanmoins deux remarques :

– Il a mis en lumière une pratique, regrettable et discutable : dès lors qu’un projet est présenté par le président d’un groupe, l’usage veut que tous les députés du groupe le votent. Il arrive ainsi, comme dans le cas présent, que des députés votent un amendement sans l’avoir lu, ni même savoir ce qu’il implique… puis retirent, ou pas, leur signature si le texte revient en deuxième lecture. Concernant l’amendement qui nous intéresse, il n’y a pas eu de deuxième lecture ni de passage par le Sénat puisqu’il s’agissait d’une procédure d’urgence.

. Il est en totale contradiction avec le nouvel article du code de l’environnement qui reconnaît à chacun le droit « de vivre dans un environnement sonore sain. » (Voir ci-dessous notre lettre ouverte aux élus LaREM du 3 décembre)

Au-delà de la sottise du signal envoyé aux citoyens, qui ne peuvent que se sentir méprisés, voilà donc un amendement inutile puisqu’il ne change rien sur le fond, mal pensé, mal rédigé, difficile à appliquer, qui ne va pas réduire le nombre de contentieux mais au contraire créer de facto une source supplémentaire d’encombrement des tribunaux.

 

* « …les citoyens ont le droit de contester la constitutionnalité d’une loi promulguée à l’occasion d’un procès.

La question prioritaire de constitutionnalité (QPC) peut être posée au cours de toute instance devant une juridiction de l’ordre administratif ou judiciaire, à tous les stades de la procédure. » Source : Conseil Constitutionnel

** « Aussi, afin de sécuriser les contentieux en cours et de laisser du temps à la profession des débitants de boissons et aux professionnels de l’immobilier de s’approprier le dispositif, il est proposé de rendre

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